Chaque saison d’animé dans notre monde moderne est marquée aujourd’hui par une énorme place laissée à un genre particulier : l’isekai. Mais d’où vient cette nouvelle tendance dans la japanimation ?
Isekai. Ce mot, aujourd’hui commun pour quiconque suit avec attention la japanimation et les tendances culturelles nippones, se traduit littéralement par « autre monde ». Pourtant, il a pris une signification bien plus précise, et est devenue une mode impossible à ignorer. Revenons sur l’origine du concept, et comment il a pris autant d’ampleur aujourd’hui.
À l’origine, un conte populaire
Si l’on se concentre sur l’origine même du concept, on peut revenir très loin en arrière. Il faut dire qu’un des premiers isekai de la culture populaire japonaise n’est autre que le conte folklorique de Urashima Tarō. Dans la légende, ce dernier trouve une tortue sur la plage et la libère dans l’océan. La tortue revient à lui et l’emmène sous l’eau au Dragon Palace passer du bon temps avec la princesse des lieux pendant quelques jours. Mais à son retour, il se rend compte que tout a changé : 100 ans sont passés sans lui ! Ne pouvant plus se rappeler de la princesse, il ouvre à tort son cadeau de départ… et se change en un vieil homme.
Naturellement, de nombreux artistes japonaises s’inspirent du folklore de leur pays pour leurs mangas. Difficile de les compter tant ils sont multiples, des yokaï aux divers démons que l’on rencontre dans la majorité des shonen. Le concept même d’isekai s’est vu absolument partout : puisqu’il ne s’agit que de parler d’un « autre monde », tous les animes se déroulant dans un monde parallèle peuvent rentrer dans cette catégorie.
Le bug du millénaire
Cependant, l’isekai tel qu’on l’entend de nos jours sous-entend surtout de se retrouver enfermé dans un jeu vidéo. Et cette tendance est naturelle : à la fin des années 90/début des années 2000, l’outil informatique (et par extension le jeu vidéo) devient de plus en plus important dans la culture populaire. Plus encore, internet se répand toujours plus vite dans de nombreux foyers, et les MMORPG prennent vie comme une sorte de curiosité culturelle tout autant qu’un terrain d’expérimentation. De là sont nées de nombreux fantasmes qui ont motivé bien des scénarios d’anticipation.
Pour la culture populaire japonaise, lier tout cela avec le jeu vidéo a été parfaitement naturel. L’un des premiers signes de cet ordre ne fut autre que la popularité (au Japon, mais aussi dans le monde) de la licence Digimon. Si elle pouvait paraître n’être qu’une pâle copie de Pokémon, elle avait en son sein des problématiques plus ancrées dans l’actualité de notre monde que son rival. Dans Digimon, le monde numérique prend littéralement vie, et de son emprise sur le monde réel dépende bien des événements. Si la notion pouvait paraître un brin grandiloquente à l’époque, force est d’avouer que c’est bien le cas de nos jours.
Toutefois, il est un animé qui a poussé le trait particulièrement loin : .hack//. Voyant la popularité grandissante des MMORPG (malgré leur statut de niche à l’époque), le développeur CyberConnect 2 a décidé d’en profiter pour créer son propre univers transmédia s’étalant sur des mangas, des animes mais aussi des jeux vidéo. C’est ainsi que .hack//SIGN, le premier animé de la franchise, s’est mis à raconter l’histoire de Tsukasa, un personnage se retrouvant enfermé dans un MMORPG sans aucune chance de s’en sortir. Du même temps, l’auteur Reki Kawahara suit la vague et lance son roman (light novel) Sword Art Online. Square Enix, lui, la même année Final Fantasy XI, le premier MMORPG de la licence. L’heure est à relier jeux vidéo et internet.
Un grand gagnant qui en fait naître d’autres
Il ne s’agissait là que des exemples. Dans les faits, de nombreuses autres séries sont nées à la même époque : il ne s’agissait que de sentir le vent tourner. Mais beaucoup, comme .hack, ont payé le prix d’être visionnaire… un peu trop tôt. La vague isekai n’a pas déferlé comme elle est aujourd’hui tout simplement car la culture internet n’avait pas la même importance culturelle qu’à nos jours.
Plus les ménages ont pu accéder à internet, plus les produits technologiques sont devenus accessibles, et plus cette culture a pris dans l’ampleur jusqu’à devenir le fer de lance de la culture populaire. C’est dans ce contexte que l’adaptation animé de Sword Art Online, le light novel de 2002 qui a su de croître à travers les années car trop modeste pour échouer, a été annoncée en 2011. Et la poudre… a pris feu. L’explosion a été immédiate. Et alors que l’industrie animé a subi bien des transformations pour arriver à tenir un rythme de production toujours plus fou, elle suit naturellement le pas et continue de proposer autant d’adaptation d’isekai tiré de créations originales, de light novel ou de mangas que possible.
Sword Art Online est bien sûr devenu l’emblème de tout ce mouvement. Mais ne vous y trompez pas : la vague allait arriver d’un jour ou l’autre. La véritable question est surtout d’arriver à prédire sa fin, et sous quelles conditions.