En 2021, Squid Game a surpris jusqu’à son diffuseur en explosant tous les chiffres sur Netflix. Trois ans plus tard, la série dystopique est de retour pour notre plus grand plaisir (malsain). Mais au-delà d’une fiction bien ficelée, Squid Game, c’est aussi une critique de la société sud-coréenne inspirée par des événements bien réels.
Le jeu du calmar (oui, les Québécois ont encore frappé) repose sur un principe relativement simple : des personnes endettées jusqu’à l’os, dos au mur, se retrouvent dans une gigantesque partie de Fall Guys pour tenter de décrocher une cagnotte qui leur permettrait de sortir la tête de l’eau. Pas de pot, comme dans le jeu des bonhommes qui tombent, quand les participants perdent une épreuve, ils ne se relèvent pas.
Tout ça est un chouia malsain, et à la manière de Parasite de Bong Joon-ho, on sent très rapidement la critique sociétale pointer le bout de son nez. Mais ce qui est le plus glaçant dans toute cette histoire anticapitaliste, c’est que certains des événements relatés au travers des flashbacks sont inspirés de faits réels.
Le deuxième épisode de la saison 2, sympathiquement titré “Hell”, revient sur le quotidien terrible des protagonistes du Squid Game. On apprend donc que Seong Gi-hun, le personnage principal, autrefois salarié chez un gros constructeur automobile, a été licencié. Cet élément du scénario de la série fait référence à un événement survenu en 2009. À l’époque, Ssangyong Motors (aujourd’hui KGM), se retrouve dans une situation financière assez compliquée. Sans surprise, les dirigeants optent pour la facilité : une énorme vague de licenciements (2 600, la moitié des effectifs) histoire de faire plaisir aux investisseurs potentiels.
En réponse, une bonne partie des salariés décide de se barricader dans l’usine principale. Pendant 77 jours, ils vont tenir. Assez rapidement, les autorités coupent l'électricité, l’eau, et tentent d’empêcher les ouvriers de se ravitailler en nourriture et en médicaments. Oui, plutôt que de négocier et d’organiser des réunions pour tenter de trouver une solution, tout ça s’est transformé en ni plus ni moins qu’un état de siège. Tragiquement, 12 jours après le début de la grève, un salarié âgé décède d’une hémorragie cérébrale.
Pendant plus de deux mois, la situation va graduellement empirer entre jets de cocktails molotov et souci pour ne serait-ce que manger. Finalement, la police est intervenue, balançant des lacrymos par hélicoptère avant de forcer l’entrée à grand renforts de tasers et autres outils de maintien de l’ordre bien cool pour l’organisme.
Après les événements, de nombreux anciens employés ont été poursuivis en justice, accusés d’avoir fait perdre de l’argent à l’entreprise. 94 salariés se sont donc retrouvés derrières les barreaux, et 230 ont dû payer des amendes colossales. Pour couronner le tout, tout cela a été accompagné d’un sympathique stigma qui a empêché pas mal d’entre eux de retrouver un emploi, les poussant dans une spirale infernale, c’est le cas du personnage de Seong Gi-hun.
Au total, d’après Lee Chang-kun, qui était à l’époque porte-parole de l’un des syndicats des travailleurs de l’usine, plus de 30 personnes touchées par ces licenciements se sont données la mort.
Comme quoi, même lorsque l’on parle d’une partie de 1, 2, 3 soleil géant, la réalité n’est jamais vraiment loin, et pas forcément beaucoup plus reluisante que la fiction.