Pacific Rim a tout l’air d’être un pur produit du Japon, n’est-ce pas ? Particulièrement alors qu’une adaptation animé arrive ? Tout faux. Et c’est tant mieux.
Vous connaissez la brochette bœuf fromage n’est-ce pas ? Qu’y a-t-il de plus ridicule sur la carte d’un restaurant asiatique que ce choix qui n’a absolument rien à voir avec la cuisine que vous êtes censé manger. Du FROMAGE bordel. Sur du BŒUF. Quel innocent peut croire que c’est une idée asiatique ? A minima, quand on voit ces deux ingrédients, il n’y a que deux choix : c’est français ou américain, très clairement. Les amis du podcast Gaijin Dash en ont fait la marque d’une œuvre qui fait tout pour avoir l’air japonaise, mais n’en est vraiment pas une. On va rajouter un petit bloc à cette formule : Pacific Rim est la brochette bœuf fromage qui se prend le plus au sérieux de tout l’univers de la pop culture. Encore plus de nos jours.
Si ça en a le goût et l’odeur...
Déjà, Pacific Rim. Des monstres colossaux attaquent une ville côtière et menacent d’envahir le monde, et la réponse de l’humanité face à cela est de créer de gigantesques robots pour les affronter en 1 contre 1 comme des bonnes grosses brutasses ? Ça sonne extrêmement japonais, évidemment… Et ça n’a absolument rien à voir. Pacific Rim est une idée nous venant de Travis Beacham, un scénariste américain ayant grandi dans le Tennessee. Sous-entendu : il est américain avec encore une petite couche d’Amérique par dessus. Il est majoritairement connu pour avoir travaillé sur Dog Days of Summer, un drama adolescent bien américain, et Clash of Titans, un film d’action bien américain des familles.
S’est ensuite ajouté au projet Guillermo Del Toro. Ou Totoro comme il finira par être surnommé par une des jeunes actrices du film Pacific Rim. Comme son nom vous l’a probablement fait deviner, le monsieur n'est pas exactement connu pour être né au pays des sushis. Bien au contraire : le réalisateur mexicain est connu pour son adaptation au cinéma du comics Hellboy, plus américain tu meurs, et le film d’horreur fantastique Le Labyrinthe de Pan, qui se déroule pendant la dictature de Franco.
Mais oui, les deux ensemble ont fait un film de kaijū. Le nom japonais (qui signifie simplement créature étrange) sert comme identificateur d’un genre né grâce aux premières apparitions de Godzilla au cinéma. Un gros monstre attaque une ville, c’est la panique, mais c’est aussi impressionnant et extrêmement stylé. Ce genre est par ailleurs né comme symbole de la peur de la guerre nucléaire au Japon… C’est donc quelque peu ironique qu’il soit repris par des Américains, mais on ne dira rien promis.
… C’est que c’est un peu Japonais ?
Mais voyez, malgré tout le cynisme avec lequel on peut voir Pacific Rim, le fait est qu’il a été embrassé par le public Japonais. Et pour cause : il déborde d’amour pour la culture nippone. Les vieilles rancœurs ne tiennent pas face à la mondialisation, et lorsqu’on approche une culture étrangère avec un respect aussi profond, c’est au contraire apprécié. Tiens donc, à croire que l’amour gagne toujours à la fin finalement. Hideo Kojima (Metal Gear Solid) l’a appelé le délire d’otaku ultime et a fait apparaître Del Toro dans son dernier jeu Death Stranding. Go Nagai, considéré comme le papa des méchas au Japon et célébré pour son œuvre Devilman, l’a également adoubé. Un carton.
Aujourd’hui, sur Netflix, vous trouverez Pacific Rim The Black. Et la brochette bœuf fromage continue de plus belle. On trouve Greg Johnson et Craig Kyle, connu pour son travail chez Marvel, en tant que showrunners. Au scénario, ce sont 4 occidentaux qui se partagent l’affiche. Les producteurs sont les très américains Legendary Entertainment. Mais quelque chose a changé : l’animation a été confiée au studio japonais Polygon Pictures, à qui l’on doit notamment Ghost in the Shell 2 Innocence et Knights of Sidonia. Ce studio a d’ailleurs aussi été responsable auparavant de Star Wars Resistance et quelques épisodes de Clone Wars.
Et ainsi, la vocation de la brochette bœuf fromage est complète. Car oui, même s’il est facile de s’en moquer, il faut avouer que cette petite addition peu coûteuse au menu de notre resto asiat préférée a des atouts pour elle. Elle sert à ramener le gamin qui chiale et lui faire plaisir malgré tout. A convaincre son pote de nous rejoindre même s’il n’a pas du tout envie de se faire des ramens. Ou même juste caler un petit supplément, pour la gourmandise. Elle permet de ramener plusieurs personnes autour d’une seule et même culture, la culture japonaise, en adaptant un peu pour mieux conquérir.
Pacific Rim, du premier film à l’animé The Black, c’est quelque part un peu ça aussi : une œuvre américaine sur laquelle on aime tous aller, qu’elle nous rappelle tout ce qu’on aime dans la culture japonaise ou qu’elle fasse naître en nous une curiosité pour celle-ci. Au bout du compte, on sait que qu’importe les raisons pour lesquelles on a décidé de la regarder, on se fera plaisir.