À première vue, Japon et pirates n’ont pas grand chose à voir… Pourtant, entre le XIV et XVIème siècle, des bandits des mers nippons appelés “Wakō” ont profité d’un contexte favorable pour semer la terreur en Mer de Chine. Retour sur leur histoire.
One Piece, le manga le plus vendu au monde, dont le jeu Odyssey sort le 13 janvier prochain, a pour cadre un monde dominé par les pirates. Barbe Noire, Thousand Sunny ou encore Shells Town… Pour donner vie à cet univers et son immense galerie de personnages, Eiichiro Oda s’est paradoxalement reposé sur l’image “occidentale” du pirate. Pourtant, il y a plusieurs siècles, la piraterie a aussi sévi dans son archipel de naissance.
La naissance des Wakô
Avant de rentrer dans le vif du sujet, faisons un petit point de contexte très général et, surtout, établissons un fait : le banditisme en mer, ce n’est pas nouveau. Depuis l’Antiquité, il est fondamentalement dangereux de prendre la mer car les risques de pillages sont réels. D’ailleurs le terme “pirate” vient du Grec ancien “peiratês”, que l’on pourrait traduire (grosso modo, hein, on a pas tout retenu de nos cours de 3ème) par “brigand des mers”. Tu l’as compris, Barbe Rousse et ses amis ne sont donc que des arrières-arrières petits-fils d’une longue tradition de bandits à voile. Et parmi ces ancêtres, il y a les Wakō.
Aux XIII et XIVème siècles, le Japon est un territoire très instable politiquement. En fait, il est littéralement coupé en deux à cause de guerres internes entre différents royaumes. Ce contexte d’instabilité est donc parfait pour le développement de la piraterie dans les eaux situées autour de l’archipel. Des petits pêcheurs pauvres se “professionnalisent” et intensifient leurs activités illégales. Cela va du racket (à gros coups de sabres, hein) à de véritables attaques. En parlant d’attaques, elles sont d’abord centrées sur les côtes du Japon mais vont progressivement se transposer sur les côtes chinoises et coréennes, comme ça, pas de jaloux.
L’âge d’or de la piraterie
Un peu à l’instar des Yakuzas (la mafia japonaise, si jamais tu ne savais pas), les pirates nippons sont très bien organisés et établissent plusieurs “châteaux des mers” sur les côtes de l’archipel. Le repaire le plus connu est situé sur l’île de Tsushima, qui est un peu l’équivalent de l’île de la Ruche dans One Piece. Elle leur sert de base arrière pour aller piller les navires marchands en Mer de Chine. La Chine, d’ailleurs, parlons-en ! Tout comme la Corée, elle va subir les foudres de ces bandits des mers. Très vulnérables suite aux terribles invasions mongoles (qui avaient, qu’on le croit ou non, des bâteaux) de la fin du XIIIème siècle, les deux nations deviennent rapidement les cibles préférées des Wakō.
Ce sont les côtes coréennes qui en font les frais en premier. Depuis l’île de Tsushima, qui se situe à mi-chemin entre le Japon et la Corée, les Wakô réalisent des raids violents, meurtriers mais aussi très lucratifs pendant plusieurs décennies. Les Coréens ont tellement de mal à gérer qu’ils en viennent à délaisser les côtes et se cacher dans les terres. Malheureusement pour eux, rien n’arrête les Wakô qui n’hésitent pas à remonter les fleuves (une technique que l’on retrouvait aussi chez les Vikings) afin de mettre à feu et à sang les villes… Ambiance.
Eh ouais, ils ne rigolaient pas du tout. On estime même que ce sont, en partie, les pirates japonais qui ont précipité la chute de la dynastie Goryeo en 1392… Après la Corée, c’est la Chine qui va subir à partir du XVème siècle de nombreux raids Wakô. Leur force de frappe est tellement impressionnante qu’ils parviennent même à remonter le Yangtsé et piller des grandes villes comme Shanghai et Ningbo (sans jamais avoir besoin de manger des fruits du démon, eux).
L’héritage
Bon, on l’a vu, les Wakô n’étaient pas des plaisantins et ont tout simplement martyrisé toute une région pendant plusieurs siècles ! D’ailleurs, leur âge d’or n’a véritablement pris fin qu’au XVIème siècle lorsque le Japon finit par s’unir. Cela permet alors au pouvoir central, de nouveau puissant, de mieux gérer le flux des attaques et de finalement ramener la paix sur la mer.
Aujourd’hui, la violence des Wakô est un traumatisme qui est toujours présent dans les mémoires collectives, surtout en Chine. D’ailleurs, cela n’a pas arrangé les relations (déjà pas terribles) entre les deux pays. Du côté de la pop culture, c’est un peu différent. Les Wakô ont peu à peu laissé place à l’image du pirate occidental sévissant dans les Caraïbes. Une imagerie sur laquelle se base notamment beaucoup… One Piece. Bon, après, l’arc narratif du manga n’est toujours pas fini et il y a toujours une possibilité que Luffy, posté en haut du mât du Thousand Sunny avec sa longue vue, aperçoive au loin un bateau rempli de Wakô prêts à en découdre…
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