Joue-là comme Valheim
Dossier
PUBLIÉ LE 20 juil. 2022

Joue-là
comme
Valheim

Crédit : Coffee Stain Publishing
Etienne C.
Etienne C.
Auteur Micromania-Zing
PUBLIÉ LE 20 juil. 2022

Il y a un an, un petit groupe de développeurs suédois proposait une lecture différente du « survival game », moins punitive et plus accessible. En l'espace d'un mois, leur titre s'était déjà écoulé à 5 millions d'exemplaires. Retour sur la naissance d'une success story nordique.

Une forêt dense et ombragée, un héros au design primaire et à la démarche mécanique, un antagoniste en forme de tube et beaucoup de pixels. Voici, en substance, comment on peut résumer le premier build de Valheim partagé sur Youtube par Richard Svensson en septembre 2017. En examinant cette relique qui ne comptabilise qu'une dizaine de milliers de vues, difficile d'imaginer qu'on a, devant soi, la base de l'une des plus belles success stories de la scène indépendante. Et pourtant : lors de sa sortie en février 2021, le jeu de survie « bac à sable » d'Iron Gate Studios, minuscule structure basée à Skövde en Suède, surclasse ses concurrents Rust et ARK, collectionne les avis très positifs sur Steam et revendique même, deux semaines après le release, 500 000 joueurs connectés en simultané. Tout ça avec un budget serré, cinq salariés et sans campagne marketing délirante. Mais comment est-ce possible ? Éléments de réponse, avant le portage de Valheim sur Xbox prévu pour 2023.

La quête du concept parfait

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Crédit : Coffee Stain Publishing

Le succès de Valheim est rapide, presque inespéré, mais la route fut longue. On s'en rend aisément compte en se baladant sur la chaîne de Richard Svensson qui documente l'ensemble des projets sur lesquels il a planché en parallèle de son boulot. Il y a d'abord eu Steamracer, jeu de course simpliste et sans relief. Puis Rocks, platformer où l'on « explore un univers généré aléatoirement, bute des méchants, achète des vaisseaux spatiaux, armes et véhicules » apprend-on dans la description de la vidéo de présentation. Mais surtout Tolroko : un titre reprenant à quelques vaches près le concept de Rocks, mais en le transformant en jeu de tir à la première personne. Un projet sur lequel le Suédois bute pendant plusieurs années, avant de lâcher l'affaire. « Quand j'ai été victime de ce qu'on pourrait appeler 'le syndrome de la page blanche du développeur', je ne savais plus vraiment où aller, raconte-t-il. J'ai fini par abandonner ». Lui vient alors une énième idée : un mmorpg dans un univers fantastique, qui deviendra quelques semaines plus tard un jeu de survie en territoire viking. Peut-être à cause de la série HBO, God of War ou de la hype généralisée pour les barbus à bouclier. Mais qu'importe : l'esthétique, le concept, l'environnement : tout laisse penser que « Fejd » (qui signifie « vendetta » en suédois) - nom de code donnée à la version alpha - a des chances de percer.

Un gameplay accessible

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Crédit : Coffee Stain Publishing

Rejoint par son ancien collègue Henrik Törnqvist en 2019 puis trois autres personnes l'année suivante Richard Svensson affine son prototype qui devient Valheim et tape dans l’œil d'un « scout » d'un éditeur, connu pour la simulation Satisfactory et aussi basé à Skövde : Coffee Stain. La raison ? Valheim est un jeu de survie, certes, mais qui ne s'inspire que très peu des mécaniques éprouvées du genre. Plutôt influencé par The Legend of Zelda : Breath of the Wild et The Elder Scrolls V : Skyrim que par Rust ou DayZ, Valheim est essentiellement axé PVE, propose un objectif final (prouver sa valeur à Odin) et un gameplay moins punitif. Vous ne mourrez pas de faim ou de soif, par exemple. Réparer l'équipement ne coûte rien et si vous détruisez l'une de vos constructions, les ressources vous sont entièrement restituées. « Richard a conclu que simuler des situations juste pour les simuler n'avait pas grand intérêt » raconte Henrik Törnqvist à PCGamer. Ajoutez à cette formule une dimension coopérative et une réalisation rétro et léchée et vous obtenez un hit dépassant toutes les projections de son éditeur « en l'espace de 2h » raconte, dans une vidéo, le producteur exécutif.

Microtransaquoi ?

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Crédit : Coffee Stain Publishing

L'autre atout de Valheim est qu'il représente l'antithèse du modèle actuel dans l'industrie du jeu vidéo. Accessible financièrement (il coûte à peine plus de 16 euros sur Steam) et mis à jour régulièrement, Valheim ne propose aucun système de microtransactions. Inutile de sortir le portefeuille pour progresser rapidement dans l'univers, comme il est de plus en plus coutume de le faire. « Nous avons prouvé que l'on peut pondre un jeu réussi, tant en termes de fréquentations que de chiffre de ventes, sans se préoccuper de sa rentabilité » se félicite Albert Säfström, PDG de Coffee Stain. Une approche sans doute validée par la petite communauté formée sur Discord, suivant l'évolution du développement depuis la version alpha. « Non seulement nous avons incorporé un grand nombre d'idées des fans, mais nous avons également affiné la plupart des fonctionnalités en fonction de leurs commentaires » rappelle Henrik Törnqvist. En retour, les développeurs ont profité du coup de projecteur donné par certaines de leurs créations, comme ce Faucon Millenium ou ce stade de quidditch. Donnant, donnant.

Si la fréquentation a baissé depuis (Valheim attire quelques dizaines de milliers d'âmes chaque jour, selon SteamDB), le jeu reste un modèle de réussite qui n'aura cessé de surprendre ses géniteurs depuis sa sortie. « Nous étions pleins d'espoir, mais réalistes quant aux perspectives d'un jeu de survie en accès anticipé réalisé par une seule personne, rappelle Henrik Törnqvist. Nous pensions qu'il plairait à un public très niche, mais nous n'aurions jamais pu anticiper qu'il fascinerait des millions de personnes ». Started from SteamRacer now we here.