Entre Alan Wake, Resident Evil et maintenant Alone in The Dark, c’est la saison du renouveau pour les survival horrors. Et si les deux premiers nommés jouissent d’une telle notoriété, c’est en grande partie grâce à Alone in The Dark qui n’est rien de moins que le père du genre.
Tu pensais (bien naïvement) que Brive-la-gaillarde n’était rien d’autre qu’une terre de rugby ? Pas du tout. Brive, c’est aussi le lieu de naissance de Frédérick Raynal. Et si ce nom ne te dit rien, sache qu’il s’agit tout simplement d’un des monuments du jeu vidéo français (et international si l’on se fie à l’impact qu’il a eu) et du créateur d'Alone in The Dark. Mais pourquoi est-ce que tout le monde parle de ce soft ? Tout simplement parce que sans lui, tu peux oublier Jill Valentine, Wesker et toute la team.
La naissance du projet
Si tu es un habitué des vidéos du Joueur du Grenier (ou que tu as grandi dans les années 90), tu connais probablement Infogrames. Il faut dire que les bougres ont sorti quelques jeux aux hitboxes et gameplays assez redoutables comme Tintin au Tibet ou Les Schtroumpfs. Heureusement, ils se sont rattrapés en recrutant ce bon Frédérick Raynal et en le laissant bosser sur ce qui deviendra le premier survival horror.
Passionné par la 3D et les films d’horreurs de Dario Argento (Le Fantôme de l’Opéra) et George A. Romero (La Nuit des morts-vivants), Frédérick joint l’utile à l'agréable puisque, coup de bol : Infogrames possède les droits de Call of Cthulhu, et ses patrons acceptent de le laisser bosser sur un jeu qui sent bon la goutte de sueur dans le cou.
Des choix déterminants
À cause des limitations techniques de l’époque (notamment causées par les décors, mêlant rendus photo et polygones) les développeurs décident d’utiliser un point de vue fixe dans chaque pièce du jeu. Cela peut sembler anodin, mais ce choix va avoir des conséquences dignes d’un effet papillon sous stéroïdes. En positionnant stratégiquement le point de vue du joueur, les petits malins de l’équipe de Frédérick Raynard poussent la tension à son paroxysme. On avance le dos tourné vers une porte ouverte, on laisse de la place sur les plans pour insinuer que quelque chose pourrait surgir derrière le protagoniste etc.
En 1992, Alone in The Dark sort et rencontre un succès instantané. Au même moment, à l’autre bout de la planète, le studio à l’origine de Street Fighter bosse sur un survival horror. En charge du projet, Shinji Mikami met les mains sur une copie du bébé de Frédérick Raynard. Impressionné, il décide d’adopter le même système de caméras pour le jeu en développement, un certain Resident Evil.
Oui, la franchise la plus vendue de l’histoire de Capcom a été grandement influencée par un produit de chez nous. Mikami l’a répété à plusieurs reprises, sans Alone in The Dark, RE aurait probablement été un FPS.
Une temporalité qui fait flipper
Au début des années 90, le temps dans les jeux vidéo ne fonctionnait pas de la même manière, on pouvait se lever en pleine partie, aller vérifier la cuisson du bœuf bourguignon, revenir s’asseoir et reprendre tranquillement. Aujourd’hui, tu peux essayer de faire ça sur Alien : Isolation, mais tu vas finir en kebab pour xenomorphe (le jeu ne se met même pas en pause pendant les sauvegardes, c’est dire).
À l'époque, les jeux d’aventure reposaient quasi exclusivement sur le point’n’click. On avait donc tout le temps du monde pour prendre une décision, c’était le cas dans (entre autres) Le Secret de Monkey Island, Dune et beaucoup d’autres. Grosse nouveauté donc : Alone in The Dark est un jeu en temps réel, dans lequel on retrouve (en plus) des ennemis qui viennent ajouter leur (gros) grain de sel à une ambiance déjà bien pesante.
Une nouvelle fois, cette mécanique sera reprise dans tous les sens dans les jeux futurs (de Resident Evil en passant par Silent Hill ou, plus près de nous, Dead Space).
Multi-dimensionnel
Puisqu’on parlait du fait que le jeu développé par Infogrames mettent en scène des ennemis, il est aussi important de noter la naissance d’une idée qui est tout simplement devenue clef (en plus d’être un facteur de stress monumental) : l’immortalité de certains mobs. Affronter des zombies, ça peut être un tantinet éprouvant. Mais se battre contre un ennemi que l’on ne peut tout simplement pas vaincre, et qui nous suit partout pendant une bonne partie de l’aventure, c’est tout de suite bien pire. Ça aussi, on le doit à Alone in The Dark (merci hein).
De plus, l’exploration du manoir présent dans le jeu repose sur d’autres mécaniques comme la résolution d’énigmes diverses et variées. Là-aussi, c’est une nouveauté puisque les jeux de l’époque mêlaient très rarement plusieurs types de gameplay. Ici, on se bat, on explore, on résout des énigmes, on gère son inventaire… bref, l’ensemble est très, très complet (surtout pour l’époque).
Pour toutes ces raisons, Alone in The Dark mérite sa place de (quasi) géniteur du genre survival horror. Alors on met son plus beau chapeau, on affine sa moustache et on part explorer un manoir niché au fin fond du Bayou.
Alone in The Dark est disponible sur PC, PS5 et Xbox Series X.