Super Mario Bros, Far Cry, Doom : de nombreuses licences mythiques ont été maltraitées par le monde du cinéma. À tel point que certaines productions ont obtenu le statut de film culte pour leur médiocrité.
Super Mario Bros. (1993)
C’est l’un des plus grands naufrages cinématographiques du XXe siècle. Dans les nineties, de nombreux studios s’intéressent à la licence Super Mario Bros, mais c’est finalement les producteurs Roland Joffé et Jake Heberts qui, grâce à un pitch visiblement convaincant, parviennent à persuader Hiroshi Yamaushi de leur céder les droits contre 2 millions de dollars. À l’époque, leur but est clair et affiché : repenser les personnages pour cibler un public de jeunes adultes et « reproduire ce que Burton avait réalisé pour Batman ». Un sacré programme, mais tout ne va pas se passer comme prévu.
Le film, crédité d’un budget de 50 millions de dollars (une belle somme pour l’époque, ndlr), a pourtant des arguments, notamment au niveau du casting. Si Bob Hoskins, Dennis Hopper et John Leguizamo héritent des rôles principaux, d’autres acteurs de renom ont été approchés par la production. Le rôle de Bowser est proposé à Arnold Schwarzenegger, celui de Luigi à Tom Hanks. Tous deux refusent, tout comme Danny DeVito et Harold Ramis, également pressentis.
Le tournage, qui dure dix semaines, n’est qu’un enchaînement de couacs. Pour une raison simple : le script, volontairement décalé par rapport à l’oeuvre de Nintendo, est continuellement réécrit car producteurs, réalisateurs et acteurs ne l’envisagent pas de la même manière. Parfois, les dialogues sont improvisés sur le vif. « C’est très difficile de refaire un film pendant le tournage et c’est ce qui a engendré beaucoup de problèmes » raconte Rocky Morton à Nintendo Life. Résultat des courses : le film est un échec aussi bien critique que commercial et ne génère que 20 millions de dollars de recettes. Et s’octroie, malgré lui, le statut de nanar culte.
Street Fighter (1994)
Un an après l’échec Super Mario Bros, la licence de Capcom bénéficie de sa première adaptation cinématographique. Comme on pouvait s’y attendre, le film est assassiné pour ses scènes de combat ridicules et son manque de profondeur scénaristique. Côté recettes, cependant, Street Fighter s’en sort bien mieux que son prédécesseur. Le long-métrage génère plus de 100 millions de dollars en l’espace de quelques semaines, car la stratégie de Capcom porte ses fruits : mettre un paquet de fric sur le casting. Jean-Claude Van Damme, considéré comme l’acteur de film d’actions le plus bankable de l’époque, accepte d’incarner Guile. Tout comme Raúl Juliá, connu pour avoir interprété le rôle du père dans La Famille Addams, qui hérite du rôle de Bison.
Sauf que cette stratégie a un prix : « Ça voulait dire que tous les autres acteurs devaient être de nouveaux noms » explique Steven E. De Souza. « Nous n'avions plus l'argent pour les embaucher à l'avance pour l'entraînement au combat ». Le réalisateur doit également accéder aux requêtes de Capcom qui insiste pour que l’ensemble du roster du jeu apparaisse à l’écran ou impose la présence de Kenya Sawada, « un acteur qui parle à peine anglais » rappelle The Guardian.
Autre défi pour l’équipe du film, et pas des moindres : gérer Jean Claude Van Damme. Un homme dont l’ego est proportionnellement comparable à sa consommation de cocaïne : « Je ne pouvais pas en parler à l'époque, mais je peux maintenant : Jean-Claude a perdu la tête à cause de la coke » rembobine Steven de Souza. « Jean-Claude était tellement absent que j'ai dû chercher dans le scénario pour trouver autre chose à filmer. Je ne pouvais pas rester assis pendant des heures à l'attendre. A deux reprises, les producteurs lui ont permis d'aller à Hong Kong. Les deux fois, il est revenu tard. Le lundi, il n'était jamais là. » Heureusement, depuis, il a troqué ses rails contre des packs d’eau. Car on le sait : dans trente ans, il n’y en aura plus.
Double Dragon (1994)
Nanar mémorable des nineties, Double Dragon est une adaptation du beat them all éponyme, extrêmement populaire sur bornes d’arcades lors de la décennie précédente. L’intrigue du film se déroule dans une version apocalyptique de Los Angeles (rebaptisée « New Angeles » parce que oui, on est dans le futur, ndlr). La ville est contrôlée par un type possédant la moitié d’un médaillon magique et qui cherche à récupérer l’autre. Jusqu’ici, pourquoi pas.
Seul problème : Double Dragon est un film d’action sans sang, blessures ou véritables scènes de combat. Car dans la tête de James Yukich, le réalisateur, le film (qui a été interdit aux moins de 13 ans lors de sa sortie en salles, ndlr) était destiné aux enfants. « Dès que j'ai lu le scénario, je me suis dit : " C'est un film pour enfants. Ça pourrait être un super film d'enfant » se rappelle-t-il lors d’un entretien accordé à GameInformer. « En tant qu'adulte, je me serais dit : ‘C’est le pire film d'action que j'ai jamais vu !’ ». Résultat : le film ne génère que 2,3 millions de dollars. Soit presque 630 millions de recettes de moins que Kung Fu Panda qui, lui, est un véritable film de kung fu pour enfants. Comme quoi, James Yukich avait raison : il y a un marché.
Doom (2005)
Sur le papier, le bébé d’id Software a un joli CV : il a fait rentrer le FPS dans la norme, été pris pour cible par la classe politique et lancé la mode du « Doom-like ». Oui mais voilà, Doom c’est aussi un long-métrage que tout le monde a oublié, et à raison. Sorti en salles en octobre 2015 et réalisé par Andrzej Bartkowiak (également responsable du contestable Street Fighter : Legend of Chun-Li, ndlr), Doom avait toutes les cartes en main pour cartonner au box-office : un casting intéressant (Dwayne « The Rock » Johnson, Rosamund Pike), un beau budget alloué à la production (60 millions de dollars) et une intrigue certes classique mais acceptable. Difficile de faire mieux en se basant sur un jeu conçu par un type qui pense que « l'histoire dans un jeu vidéo c’est comme une histoire dans un film porno ».
Comme beaucoup d’adaptations avant lui, Doom est incendié par la critique et le public à cause de son manque d’originalité et ne parvient pas à rentrer dans ses frais. Dwayne Johnson, redevenu l’acteur le mieux payé du globe en 2019, n’en garde pas un souvenir mémorable : « J’ai vécu la malédiction du jeu vidéo, parce que j’ai fait Doom » rappelait-il lors de la promo de Rampage, autre adaptation d’un jeu populaire dans les eighties. « Doom était un jeu vidéo très populaire, et le film n’a eu aucun succès. » C’est pour ça qu’on conseille toujours de lire les conditions avant de signer un contrat, Dwayne.
Far Cry (2008)
En 2008, quelques âmes égarées découvrent l’adaptation de Far Cry, la licence à succès d’Ubisoft. Seul problème : le film est réalisé par Uwe Boll, qui n’est pas n’importe qui dans le monde du cinéma. En quelques années, l’Allemand s’est forgé une petite renommée en massacrant Alone in the Dark, BloodRayne ou Postal. Mais aussi en se faisant recaler par Blizzard pour l’acquisition des droits de Warcraft ou étant la cible d’une pétition l’invitant à « quitter définitivement l’industrie du cinéma » en 2018. Bref, un crack comme on en fait plus.
Mais à l’époque, le réalisateur l’annonce : il a « appris de ses erreurs ». Dans une interview accordée à DenofGeek, il précise avoir « suivi l’histoire de Jack Carver a la lettre » et confie « être très content du résultat final ». À quoi ressemble ce fameux résultat final ? Un film qualifié d’ennuyeux, répétitif et de mauvais goût qui ne récolte que 12% d’opinions favorables sur Rotten Tomatoes. Le cinéma, tu l’aimes ou tu le quittes Uwe.