On a discuté avec le fondateur d'un groupe de supporters de Paris Eternal, équipe professionnelle engagée en Overwatch League. Mais être ultra d’une équipe d’esport, ça veut dire quoi au juste ?
Comment vous est venue l’idée de créer un groupe d’ultras ?
Zekfu – fondateur du Rooster Club : L’idée m’est venue le soir du reveal de l’équipe Paris Eternal (le 8 novembre 2018, ndlr). Étant déjà fan d’un sport traditionnel comme le football – et du Stade Rennais - j’ai retranscris ça sur Overwatch car je suivais déjà la première saison de la compétition par le biais des Los Angeles Valiant et ses frenchies : SoOn et Unkoe. Et puis, le soir de l’annonce de Paris Eternal, j’ai vu le line up, les français, et je me suis dit : pourquoi on n’essaierait pas de se démarquer du reste de l’Overwatch League en créant un club de supporters ? Cette idée ne s’est pas construite dans le temps. Je me suis dit : allez go, il n’y a aucun club de supporters qui se détache. C’est comme ça que je me suis lancé, seul. Et je ne m’attendais pas à ce que cela paye.
En tant que fondateur comment avez-vous procédé ? Quelles sont vos tâches
quotidiennes en rapport avec le Rooster club ?
Pour commencer, je me suis entouré gens compétents dans tous les domaines : rédaction, montage vidéo, motion design, communication, graphisme, un peu de tout quoi. Au quotidien, on s’occupe d’entretenir une hype constante autour de l’équipe. On réfléchit constamment à des nouvelles techniques de communication sur Twitter, ou de nouvelles réactions à fournir sur notre site internet. On réfléchit également à de nouveaux événements : avec qui, quand… Bref, c’est beaucoup d’organisation. C’est assez répétitif comme tâches. C’est une année de rodage, on attend de voir comment les gens réagissent à notre travail.
Êtes-vous en contact direct avec des membres de l’équipe (staff ou joueurs) ?
Oui, je suis très proche de Michael De Wit, le manager général de l’équipe. Il est présent sur notre Discord, et je discute très régulièrement avec lui. On prend souvent des nouvelles l’un de l’autre. Il nous a donné beaucoup de conseils sur la manière de lancer nos projets, la façon de communiquer. Aujourd’hui, on s’est un peu émancipé de tout ça, mais je lui pose souvent des questions et Paris Eternal nous aide beaucoup. Ils nous soutiennent à 2000% dans notre projet.
L’équipe Paris Eternal est basée sur le territoire américain et ne comporte pas
que des joueurs français. Dans ce cadre, comment arrivez-vous à vous
identifier à cette équipe ? Par quels biais représente-t-elle la France ?
Ce n’est pas l’équipe qui nous représente sur le territoire américain, c’est nous qui les représentons en Europe. C’est avant tout une équipe européenne. Les français s’attachent forcément parce que c’est l’équipe de Paris, la capitale. C’est l’image de la France, et puis elle est composée de quatre joueurs français qui nous représentent en Overwatch League. Mais beaucoup de gens se trompent un peu en disant : « Paris (Eternal) c’est français », non, Paris c’est européen. Moi je m’identifie à Paris Eternal parce l’équipe est intégralement européenne, car pour le moment elle n’a pas décidé d’aller chercher des joueurs ailleurs (notamment en Corée du Sud).
Quelle utilité pour un fan lambda des Paris Eternal de faire partie du Rooster
Club ?
Déjà, étant donné qu’on est relativement proche de l’équipe, tu pourras poser tes questions plus facilement en interne, elles remonteront plus facilement. Ils nous répondent. On a la chance d’avoir des infos que les fans n’ont pas. Rejoindre le Rooster Club, c’est avoir la volonté de mettre à profit son amour pour le jeu et pour l’équipe elle-même.
Et du coup, les jours de match, comment se concrétise votre mouvement
malgré la distance ? (les matchs se jouent à Los Angeles, ndlr)
Quand on n’est pas en train d’organiser un événement, on est derrière notre PC sur Twitch à regarder le match, comme tout le monde. Sauf qu’on joue notre rôle de club de supporters sur Twitter. On communique le résultat en temps réel, on réagit aux actions en direct. Mais oui, le plus délicat là-dedans c’est que notre supporting ne peut passer que sur Twitter. Sinon, on organise tout simplement des « viewing parties » : on invite les fans dans un lieu qu’on a choisi au préalable, pour regarder le match ensemble dans une ambiance sympa.
Quels sont vos objectifs à moyen/long terme, et idéalement comment est-ce
que vous voyez évoluer le Rooster Club ?
C’est compliqué de savoir où en sera Overwatch et l’Overwatch League dans un an. On ne peut pas se projeter. On sait qu’il y aura la Coupe du Monde, mais personne ne peut savoir ce qu’il va se passer pour l’Overwatch League l’an prochain. Nous sommes dépendants de la structure, de ce qu’elle va devenir. On a de gros projets en tête, mais on ne peut pas commencer à y réfléchir maintenant.
Et justement quel est votre avis par rapport à l’Overwatch League ? Comment
est-ce que vous la voyez évoluer ?
C’est une ligue magnifique. Pour moi, c’est la première vraie ligue internationale de jeux vidéo. C’est hebdomadaire, on a des phases de pause entre les différentes étapes. Pour moi, c’est la première compétition d’esport au monde. Mais à côté de ça, elle a un gros problème : sa diffusion. Pour nous, fans européens, c’est très compliqué avec le décalage horaire. Et encore. Cette année, c’est bien moins pire que l’an dernier. Paris Eternal s’est battu pour avoir des horaires de matchs acceptables, pour que les fans européens puissent regarder. Ce qui serait génial, ce serait d’organiser une saison régulière complète, avec les vingt équipes qui joueraient leurs matchs en même temps.
En mettant les Paris Eternal de côté, est-ce que vous consommez beaucoup
d’Overwatch, en jouant ou en regardant d’autres équipes ?
Personnellement, je bouffe littéralement Overwatch. Depuis trois ans, je ne décroche pas. Si j’allume mon ordinateur, je joue forcément. Je le trouve parfait, il regroupe tellement d’univers de jeux différents. N’importe qui peut se mettre à Overwatch et aimer ce titre. Dans le Rooster Club, absolument tout le monde crame le jeu.
Sur le sol français, que pensez-vous de l’engouement autour d’Overwatch ?
Est-il en pleine progression ? Ou, au contraire, est-t-il en plein déclin alors que
des premières rumeurs évoquent Overwatch 2 ?
Je ne vais pas parler d’Overwatch 2. Pour moi, c’est un projet qui est trop fantomatique pour qu’on puisse spéculer dessus. Mais en parlant de la hype française autour d’Overwatch, je pense que ça monte en puissance au fur et à mesure. Ça a commencé gentiment quand le jeu est sorti, notamment lors de la première Coupe du Monde. Puis l’année d’après, ça a explosé avec le six Rogue (équipe emblématique sur la scène professionnelle, composée uniquement de joueurs français) qui a réalisé une performance magnifique avant de se faire sortir par la Corée. Le public français pouvait avoir un peu de mal à s’identifier à la base parce qu’il n’avait pas équipe à supporter. Maintenant qu’il y a Paris Eternal, je sens les gens beaucoup plus investis. On l’a vu aux qualifications en France à Paris. Jamais un rassemblement à l’international ne sera capable de reproduire l’ambiance parisienne. Les français sont des grands malades.