Leeroy Jenkins, pandémie du « sang vicié », adaptation au cinéma : à l’occasion de la sortie de World of Warcraft Classic, retour sur les moments qui ont marqué l’histoire de la licence de Blizzard.
23 novembre 2004 : le succès du jeu surprend Blizzard
Après plusieurs années de développement et de phases de beta testing, World of Warcraft sort officiellement en Amérique du Nord et en Australie en novembre 2004. Une date qui coïncide avec le dixième anniversaire de la franchise, débutée avec Warcraft : Orcs and Humans en 1994. Accueilli positivement par la critique, le titre suscite un engouement immédiat. Et le studio, qui a pourtant accouché de Starcraft, Diablo ou Warcraft III, n’y est pas préparé : « Nous avions largement sous-estimé le nombre de jeux que nous allions vendre, mais aussi, je crois, le temps que les gens allaient passer à y jouer chaque jour. Et nous n'étions pas préparés, sur beaucoup de plans » explique Rob Pardo - directeur créatif de Blizzard - à USGamer. « D’un point de vue purement technique, nous n'étions pas préparés (…) Nous n'avons jamais vraiment vécu ce que c'est que d'être dans un jeu qui ne finit jamais. »
25 avril 2005 : la (première) chute de Ragnaros
Dans la version « vanilla » (sans extensions, ndlr) de World of Warcraft, Ragnaros était l’un des principaux boss, mais aussi l’un des plus redoutés. Et il a fallu attendre 154 jours avant que la guilde Ascent, originaire des États-Unis, n’en viennent à bout sur le serveur Medivh. Dans l’histoire du jeu, où le « world first » est un objectif et une norme pour des guildes qui se professionnalisent de plus en plus (coucou Method), aucun boss n’est resté aussi longtemps invaincu depuis. Inclinez-vous, mortels.
10 mai 2005 : Leeroy Jenkins devient un phénomène mondial
C’est l’histoire d’un raid raté qui a fait le tour du monde. Le 10 mai 2005, une vidéo de la guilde PALS FOR LIFE, sobrement intitulée « A Rough Go », est postée sur le site officiel de World of Warcraft, ainsi que sur WarcraftMovies.com, un site communautaire. Dans la séquence, la guilde échafaude un plan visant à récupérer du stuff pour l’un de ses membres, Leeroy Jenkins, dans un donjon du pic Rochenoir. Problème : le principal concerné est AFK lors du briefing, parti se réchauffer son KFC paraît-il. À son retour, Leeroy Jenkins ne s’attarde pas sur les questions stratégiques et fonce dans le tas en criant son pseudo. En l’espace de quelques semaines, la vidéo - qui comptabilise plus de 47 millions de vues sur Youtube aujourd’hui - devient virale. « J’ai été vraiment étonné de l’ampleur du phénomène » raconte Staffan Sundblad, le gérant de WarcraftMovies.com. « La vidéo de Leeroy était encore en tête des téléchargements un an après avoir été postée. Pour moi, Leeroy est le joueur le plus connu de World of Warcraft dans le monde. » Rapidement, la notoriété de Ben Schulz (le fan de KFC en question, ndlr) dépasse les frontières du jeu et Leeroy Jenkins devient un véritable phénomène pop culture. De nombreuses séries télévisées y font référence, comme How I Met Your Mother, Scrubs ou Community. Une carte sur Hearthstone, le TCG de Blizzard, lui est dédiée. Mais il y a un hic : la guilde avait tout planifié, comme elle le révèle en 2017 : « Nous ne pensions pas que quelqu'un croirait que c'était réel, nous pensions que la satire était évidente » confie Ben "Anfrony" Vinson, qui a enregistré la séquence, à Kotaku. « Mais nous avions tort ». Tort partagé.
13 septembre 2005 : la pandémie du « sang vicié » ravage des villes entières
Hakkar. Voici le nom du personnage responsable de la plus grande pandémie virtuelle de l’histoire. En septembre 2005, Blizzard déploie un nouveau patch sur les serveurs, ouvrant les portes de Zul'Gurub où siège ce boss qui applique un débuff (Sang vicié, ndlr) sur ses victimes, infligeant des dégâts sur la durée. Problème : le debuff se transmet aux joueurs à proximité, et bon nombre d’entre eux quittent Zul'Gurub en restant infectés. En l’espace de quelques heures, la maladie se propage à grande échelle et entraîne la mort de nombreux joueurs. Les développeurs de Blizzard mettront plusieurs jours à corriger le tir : « C’était vraiment effrayant quand on ne savait pas pourquoi c'était arrivé » se remémore John Cash, l’un des développeurs. « Même une fois qu'on a compris ce qui se passait, c'était vraiment, vraiment difficile à corriger. ». Un épisode sanglant qui a, d’ailleurs, été étudié par une épidémiologiste américaine pour comprendre les réactions humaines face aux pandémies.
22 janvier 2008 : la barre des 10 millions d’abonnés est franchie
On le sait : Blizzard Entertainment ne partage plus ses chiffres depuis un moment. Depuis le déclin du jeu, en fait. En 2018, certains observateurs estimaient que 2 millions de joueurs jouaient encore régulièrement à World of Warcraft. Une baisse de fréquentation qui s’explique, entre autres, par la popularité grandissante d’autres jeux pondus par Blizzard, comme Overwatch ou Hearthstone. Mais la firme n’a pas toujours planqué ses chiffres sous le tapis : à la fin des années 2000, le studio les arborait fièrement, comme pour justifier la pertinence et la longévité de son titre phare. Le 22 janvier 2008, le cap significatif des dix millions d’abonnés est franchi pour la première fois. En 2010, World of Warcraft revendique plus de 12 millions d’abonnés dans le monde : un record inscrit dans le Guinness World Record. Une autre époque.
5 octobre 2012 : le jeu s’invite dans le débat politique américain
Régulièrement pris pour cible par la classe politique en raison des (potentiels) problèmes d’addiction qu’il engendre, World of Warcraft devient, pour la première fois, une arme permettant de discréditer une personnalité politique. En 2012, Colleen Lachowicz, candidate démocrate dans l’état du Maine, est accusée de mener une « double vie » par ses adversaires républicains, ce qui soulève des « interrogations sur sa qualification pour le job ». En cause : sa passion pour World of Warcraft qui la transformerait, la nuit, en Santiaga : un « orc assassin de niveau 68 qui poignarde un paquet de trucs », peut-on lire sur l’affiche faisant la promotion d’un site visant à la discréditer aux yeux des électeurs. Mais la tactique est trop bancale pour gagner les élections. Colleen Lachowicz - qui est largement soutenue sur les forums et réseaux sociaux - est élue en novembre 2012 au Sénat. America, fuck yeah.
3 juin 2016 : l’univers de Warcraft est adapté au cinéma
En 2006, Legendary Pictures (Batman Begins, Superman Returns) annonce que l’univers de Warcraft sera adapté sur grand écran. Mais le projet ne prend réellement forme que plusieurs années plus tard. En 2013, Blizzard annonce que Duncan Jones (Moon, Source Code) s’attèlera à la réalisation. Le tournage dure 123 jours, et Warcraft : le commencement sort le 3 juin 2016. Plusieurs millions de spectateurs se ruent dans les salles, et le long-métrage réalise un démarrage canon au box-office. La semaine suivante, les recettes baissent de 73% mais l’exploit est déjà enregistré : Warcraft : le commencement devient l’adaptation d’un jeu vidéo au cinéma la plus rentable de l’histoire, avec 400 millions de dollars de recettes en l’espace de 15 jours. Dont 205 millions de recettes provenant de Chine, tout de même.
World of Warcraft Classic sort le 27 août 2019 sur PC.